Cappella Nova - MacMillan: Consecration - Crescendo
Son : 9 Notice : 10 Répertoire : 8 Interprétation : 9
Le présent album est le quatrième que le label Linn consacre à la musique sacrée de Sir James MacMillan, compositeur écossais de foi catholique, politiquement engagé, notamment lorsqu’il a pris position il y a quelques années contre les velléités de séparatisme. Si ses premières attirances musicales se sont dirigées du côté du modernisme de Darmstadt ou de Donaueschingen, il a ensuite été influencé par les Polonais Lutoslawski et Penderecki, mais aussi par son confrère anglais Sir Peter Maxwell Davies et par Schnittke. James McMillan, qui n’était pas encore anobli (ce fut le cas en 2015) s’est fait vraiment connaître à l’occasion des concerts des Proms, en 1990, lorsque son œuvre The Confession of Isabel Gowdie, sorte de requiem en hommage à une victime de l’Inquisition du XVIIe siècle, a été acclamée entre une symphonie de Beethoven et le concerto pour violon de Sibelius. Son langage, devenu des plus accessibles et marqué notamment par la musique traditionnelle écossaise, a alors pris des accents sacrés profondément marqués, lui assurant une grande popularité. Cantates, oratorios, hymnes, messes, Magnificat, Te Deum, Passions selon Saint Jean et selon Saint Lucont trouvé place au sein d’un vaste catalogue où l’on note aussi un célèbre Concerto pour percussion Veni, Veni, Emmanuel, écrit à l’intention d’Evelynn Glennye, un concerto pour violoncelle que Rostropovitch a joué, un concerto pour piano, plusieurs symphonies (dont une Cinquième, puissamment évocatrice, chez Coro), des pages pour orchestre, de la musique de chambre et deux opéras.
Le programme de cet album est consacré à une série de pages écrites entre 2011 et 2019, dont une révision de la bien connue St Anne’s Mass de 1997 pour voix à l’unisson, orgue et chœur, qui prend en compte en 2011 la nouvelle traduction de l’ordinaire de la messe autorisée dans le culte catholique. Il s’agit du premier enregistrement professionnel de cette courte partition (Kyrie, Gloria, Sanctus) à composante émotionnelle dont le charme agit toujours. Les autres œuvres ici proposées font l’objet d’un premier enregistrement mondial. The Culham Motets ont été créés en décembre 2015 à l’occasion de la consécration de la Chapelle du Christ Rédempteur à Culham Court dans le Berkshire. En cinq parties d’une durée globale d’une demi-heure, c’est la plus vaste partition du programme. Des textes de psaumes sont chantés par un chœur a cappella d’où émergent des interventions de voix solistes, un ténor et trois sopranos, au nombre desquelles figure Rebecca Tavener qui signe la notice au sein de laquelle sont reproduites des précisions du compositeur sur sa musique chorale. Diverses évocations d’images traversent ces motets : fresques romantiques, espaces sacrés marmoréens, allusions au film Brother Sun, Sister Moon de Zeffirelli sur Saint François d’Assise, méditation spirituelle… On se laisse envahir par une magie visionnaire ou éthérée parfois proche de l’envoûtement mystique.
Une série de courtes pages jalonnent ce disque : MacMillan invite au partage d’événements familiaux : le mariage de son fils Aidan en 2018 (Until the day breathes, tiré du Livre de Salomon), puis celui de sa fille Clare en 2019 (tendre Wedding Song, où texte biblique et poésie écossaise sont présents). Moment de recueillement aussi, avec Lux aeterna, dans une intimité poignante, distillée par Rebecca Tavener, à l’occasion de l’enterrement du père du compositeur, également en 2019. On découvre encore l’apesanteur émotionnelle du Beatus Andreas de 2011 pour chœur sur fond d’orgue en l’honneur de Saint-André, le patron de l’Ecosse, ou la jouissive et dansante pièce pour orgue Kenga e Krushqve, que magnifie Steven McIntyre, organiste à Glasgow, que l’on entend souvent tout au long de ce parcours musical. On se délectera avec le glorieux A Special Appeal pour chœur et orgue, entre proximité du silence et rythmes accentués, ou avec Sing joyfully to the Lord, qui clôture ce panorama sacré sur un texte du psaume 33, exaltation de la grandeur du Seigneur dans une aura de lumière, voix et orgue proches de l’extase.
Le fidèle transmetteur de la musique sacrée de Sir James MacMillan qu’est Alan Tavener, un habitué de programmes religieux ou liturgiques, est à la tête de la Cappella Nova qu’il a fondée en 1982 avec son épouse Rebecca. Il donne à ce quatrième programme spirituel consacré au compositeur toute la dimension qu’il mérite, en lui insufflant la fine subtilité qui est au détour de ces pages écrites dans un langage accessible qui parle au cœur, enregistrées en octobre 2019 dans l’église paroissiale Greyfriars Kirk d’Edimbourg.